« On a retrouvé l’histoire de France, comment l’archéologie raconte notre passé » Jean-Paul Demoule


Retour vers le passé

Jean-Paul Demoule est né le 7 août 1947 à Neuilly-sur-Seine, en Ile-de-France. Très vite attiré par l’Histoire et notamment par l’Archéologie, il entreprit un parcours universitaire à l’issu duquel, il est devenu « professeur émérite de protohistoire européenne à l’université de Paris I (Panthéon-Sorbonne) et membre honoraire de l’Institut Universitaire de France. Il est notamment connu pour avoir participé à la création de la loi sur l’archéologie préventive1 et à la création de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), qu’il a présidé de 2001 à 2008 » 2.

Il est notamment l’auteur de nombreux ouvrages sur la thématique de l’archéologie. Il se propose dans certains d’entre eux de dépoussiérer quelques mythes et idées reçues que nous portons sur notre histoire, et ce, notamment dans l’ouvrage qui nous occupe.

On a retrouvé l’histoire de France, comment l’archéologie raconte notre passé

On a retrouvé l’histoire de France, comment l’archéologie raconte notre passé, est un ouvrage rédigé par Jean-Paul Demoule en 2012 aux éditions Robert Laffont. Il a connu, depuis, plusieurs rééditions.

L’auteur nous propose, alors, de découvrir l’archéologie : une discipline formidable, au croisement de divers domaines scientifiques, permettant d’en savoir toujours plus sur notre passé, mais mal connue du grand public. L’archéologie est un atout majeur surtout à la compréhension de périodes historiques pré-invention de l’écriture environ 3 300 ans avant notre ère. En effet, les archéologues étudient les traces, les restes, encore visibles aujourd’hui, du passé, que ce soient des ossements anciens, des poteries, des fondations de monuments ou d’autres structures. Le rôle de l’archéologue est, alors, de tout mettre à jour, de proposer une datation pour ces éléments, soit en fonction d’éléments déjà connus et/ou par datation chimique, et d’en proposer une interprétation. Le tout dans le but de toujours affiner notre connaissance du passé, en nous débarrassant de vieux mythes et de clichés.

L’archéologie n’est jamais seule face à un terrain de fouille, elle est souvent accompagnée de chimie et de physique, notamment pour les datations, mais aussi de l’histoire, de sciences naturelles, comme la palynologie3, etc. En définitive, c’est un domaine riche, multidisciplinaire et pourtant très récent. En effet, jusqu’en 1941, l’archéologie n’était pas professionnalisée, il était possible à tout le monde de fouiller un site archéologique et ce, de la manière dont les personnes en avaient envie. Cela a entraîné beaucoup d’erreurs d’interprétation, de destructions de sites et/ou d’objets, de dispersions des différents éléments, etc.

L’ouvrage propose, alors, de (re)découvrir l’Histoire de France, au travers d’un autre prisme que celui dont on a l’habitude, l’archéologie. Cela permet de rendre plus concret ce passé que l’on découvre dès les bancs de l’école. Passé qui repose avant tout sur trois types de sources différentes, étudiées méthodiquement par des historiens et des historiennes :

Les sources écrites : que l’on trouve qu’à partir de l’invention de l’écriture au IVe millénaire avant J.-C.. Depuis lors, l’on a des textes de l’époque qui sont parvenus jusqu’à nous, en plus ou moins grandes quantités en fonction de la période et du médium utilisé, et qui contiennent diverses informations. Cela peut être un édit, un état-civil, un extrait comptable, un roman, etc.

Les sources archéologiques : ce sont les restes du passé encore, plus ou moins, visibles aujourd’hui. Elles sont étudiées par des archéologues, tels que Jean-Paul Demoule, et nous permettent d’affiner les connaissances de notre passé grâce à des traces concrètes. Ce peut être un reste d’une voie romaine, un temple, des sépultures, des dolmens, mais aussi de choses plus récentes, de la nourriture, etc.

Les sources orales et les traditions : elles sont moins étudiées par les historiens et les historiennes, car elles sont moins fiables, en effet, les souvenirs se modifient dans les mémoires. Elles sont, néanmoins, de plus en plus prises en compte par les chercheurs afin de réaliser une histoire des mentalités, des traditions. Elles sont notamment, utilisées pour l’histoire récente, où les témoins encore en vie racontent un ou des événements.

L’on comprend, alors, la place centrale de l’archéologie dans notre compréhension de notre passé.

Résumé

On a retrouvé l’histoire de France, comment l’archéologie raconte notre passé, est un ouvrage divisé en deux grandes parties.

Dans une première section, l’auteur retrace l’histoire de France à travers de grands mythes : Alésia, nos ancêtres les Gaulois, les âges sombres du Moyen-Âge, etc. Mais ce n’est pas un livre d’histoire comme on peut en trouver plein ailleurs qui se contente de retracer de manière chronologique toute l’histoire de ce territoire. Jean-Paul Demoule, nous propose ici de découvrir l’archéologie et comment elle nous permet de mieux connaître notre passé, voire de rectifier des erreurs. Pour cela, il se sert de cas concrets, de sites archéologiques fouillés, par exemple, dans le cadre de fouilles préventives avant destruction et des éléments que ces sites nous ont livré. Tous ces exemples, servent un but : faire comprendre aux lecteurs et, plus généralement aux Français, que non, l’archéologie n’est pas un bâton dans les roues de projets immobiliers. Mais également, de faire comprendre que l’on a une vision biaisée de notre passé, notamment lointain, et ce, à cause du peu de temps accordé à ces périodes dans nos programmes scolaires, mais aussi par ce que la pop culture, les films, les bandes dessinées, etc. en véhiculent une image déformée. On a tous en tête le village Gaulois tout droit sorti de Astérix et Obélix, en guise d’exemple. Pourtant, ce village gaulois n’a jamais existé dans cette forme.

Dans une deuxième et dernière partie, Jean-Paul Demoule revient sur ce qu’il appelle les « Leçons de l’archéologie ». On y retrouve plusieurs axes de réflexions très intéressants, notamment sur l’apport de l’archéologie sur nos connaissances du passé, mais aussi sur l’impact qu’elle a sur notre présent et notre futur. Il relate la manière dont l’archéologie est parfois très déformée et récupérée par des théoriciens du complot, parfois alimentés par des faux archéologiques construits dans un but financier ou idéologique. En effet, de nombreux ouvrages d’archéologie fantastique ont vu le jour, notamment à partir du Matin des Magiciens de Pauwels et Breton et qui témoignent, pour l’auteur « d’un singulier mépris, confinant au racisme, pour les civilisations antiques, les jugeant incapables d’avoir élevé elles-mêmes ces singuliers et admirables monuments« 4. Enfin, l’ouvrage se termine sur les rapports entre les Hommes, leurs conflits, leurs liens et comment cela se constate en archéologie ainsi que les impacts que cela peut avoir aujourd’hui.

« Ce livre a pour but de rendre un hommage à tous les chercheurs dont l’énergie et la passion permettent de restituer sous une forme accessible, pour toutes les citoyennes et tous les citoyens de notre pays, les acquis et les leçons de ces recherches. »

« L’archéologie permet aux vivants, grâce aux morts, de préparer l’avenir des futurs vivants. »

Un des avantages de ce livre, c’est qu’il propose à la fin, un tableau chronologique afin que le lecteur puisse se repérer dans le temps ainsi qu’une importante bibliographie, permettant au lecteur d’aller plus loin.

Mon avis sur ce livre ?

Dans cet ouvrage, Jean-Paul Demoule, nous raconte, simplement et avec humour, l’histoire de France au travers de l’archéologie. Cette discipline est souvent oubliée lorsque l’on évoque l’histoire alors que c’est, en partie, elle qui nous permet de la connaître.

En commençant la lecture de ce livre, je m’attendais à un ouvrage archéologique comme l’ouvrage des résultats de recherches des fouilles du site de Glozel. J’avais un a priori et je me suis trompée. Cet ouvrage est, selon moi, un véritable outil destiné au grand public, qui vulgarise l’archéologie dans son ensemble, c’est-à-dire son rôle, ses découvertes, ses buts, sa mise en exécution, notamment lors de fouilles préventives. Mais soulève également des questionnements au-delà de la pratique même de l’archéologie. On ressent, par ailleurs, à quel point Jean-Paul Demoule est impliqué dans son métier. Il déplore la destruction de sites archéologiques au profit de parkings souterrains, d’autoroutes. Il regrette la place de l’archéologie en France, souvent vu comme étant l’épine dans le pied de constructeurs qui attendent le feu vert pour commencer leurs travaux. Il regrette également que ce travail, soit malmené par des profiteurs réalisant des faux vendus à un prix d’or, par des personnes qui veulent voir en des sites archéologiques autre chose que ce que les scientifiques en ont dit : en voulant y voir la trace d’un passage ancien d’extraterrestres par exemple.

Je sors de cette lecture, que je ne peux que vous recommander, un peu chagrinée par ces éléments, mais motivée à me replonger dans la redécouverte de cette discipline qui a autant à nous apprendre sur notre passé que sur notre présent.


  1. Article n°2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l’archéologie préventive : « L’archéologie préventive, qui relève de missions de service public, est partie intégrante de l’archéologie. Elle est régie par les principes applicables à toute recherche scientifique. Elle a pour objet d’assurer, à terre et sous les eaux, dans les délais appropriés, la détection, la conservation ou la sauvegarde par l’étude scientifique des éléments du patrimoine archéologique affectés ou susceptibles d’être affectés par les travaux publics ou privés concourant à l’aménagement. Elle a également pour objet l’interprétation et la diffusion des résultats obtenus ». http://www.legifrance.gouv.fr ↩︎
  2. DEMOULE, Jean-Paul, Jean-Paul Demoule [en ligne]. 2022 [consulté le 6 novembre 2023]. Adresse du site : Jean-Paul Demoule | à propos (jeanpauldemoule.com) ↩︎
  3. La palynologie « étudie les pollens et les spores fossilisés piégés dans les couches successives de sédiments, afin de retracer les variations de l’environnement végétal sur de très longues périodes de temps. » INRAP ↩︎
  4. DEMOULE, Jean-Paul, On a retrouvé l’histoire de France, comment l’archéologie raconte notre passé, 2012, Robert Laffont, 333 p. ↩︎


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